Les tubes d’avril

April 7, 2009 § Leave a comment

Note Ce billet est écrit au 65ème jour de grève des universités. Le gouvernement refuse toujours toute négociation et préfère les calomnies et les menaces administratives et physiques. Ceci est un appel au gouvernement : pour le moment, le mouvement est tenu par les pacifistes. Plus vous ignorez leurs revendications, plus vous les insultez, plus vous les humiliez, plus ils vont se retirer et céder la place à ceux qui sont prêts à faire ressortir leur frustration d’une manière beaucoup moins contenue que la nôtre. Nous tiendrons jusqu’au bout de nos forces mais il faudrait que vous preniez conscience de ce qui attend les rues de France lorsque vous serez arrivés à tous nous arrêter, nous envoyer à l’hôpital ou tout simplement à l’étranger.

Dans le domaine de la contestation, il y a de nombreuses manières de jouer l’escalade. Il y a ceux qui envoient quelques compagnies de Gendarmes Mobiles, de CRS voire d’agents de la Brigade Anti-Criminalité pour ouvrir le feu sur quelques étudiants en train d’organiser un happening dans un supermarché toulousain avec l’accord du gérant. Et il y a ceux qui préfèrent jouer ça en musique.

LRU, Le Rap Universitaire

Au bout de 65 jours, vous avez fini par oublier pourquoi les universités étaient en grève ? Alors jetez un œil à cette video et vous vous en souviendrez. Vidéo due aux étudiants de Marne La Vallée.

Princess of Clèves — Fac off

Vous aussi, vous trouvez que la Princesse de Clèves n’a pas assez souffert et qu’il faut en plus que notre Bien-Aimé Président de La République la mette à la rue et à l’alcool ? Alors faites ça en musique. Vidéo due aux enseignants-chercheurs de la Sorbonne, si j’ai bien compris.

Princess of Clèves — Paroles, Paroles

Une fois à la rue, que faire de la Princesse de Clèves ? Il faut lui promettre des Rolex, bien entendu, et sur un air de Dalida.

La Sorbonne en musique

Juste un peu de musique ? D’accord, écoutez-ça ici. Profitez-en pour compter le nombre d’agents de police et de gendarmerie qui tournent.

Sans musique cette fois

Si vous avez l’âme d’un latiniste, j’espère que vous avez déjà écouté les Darcolinaires de la Sorbonne.

Pourquoi les université sont (toujours) en grève

April 4, 2009 § 6 Comments

Note Ce billet est écrit au 63ème jour de grève des universités. Le gouvernement refuse toujours de négocier sur les questions de fond, préfère toujours recourir aux tours de passe-passe et aux insultes pour faire passer ses réformes, quand ce n’est pas directement aux coups de matraque.  D’après mes comptes, nous en sommes à 5 contestataires hospitalisés et une quarantaine arrêtés de manière semble-t-il arbitraire par les forces de l’ordre. À l’heure actuelle, le gouvernement joue le pourrissement et compte sur le sens de la responsabilité des enseignants-chercheurs pour arrêter la grève et permettre aux examens, au concours et au baccalauréat de se dérouler correctement. Ne soyez pas certains que cela arrivera.

Il y a pas loin de deux mois, j’écrivais un billet pour expliquer pourquoi les universités étaient en grève. Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts. Le gouvernement a même, à un moment, fait semblant de négocier et de revenir en arrière sur certains des points parmi les plus choquants de ses réformes. Et nous sommes toujours en grève, même si ce n’est pas toujours pour les mêmes raisons qu’en février.

Pourquoi ?

« Read the rest of this entry »

Bilan d’un chercheur sur son journal de tire-au-flanc

February 25, 2009 § 5 Comments

Depuis quelques mois, le gouvernement nous explique, par la bouche de notre Président Bien-Aimé, de Valérie Pécresse ou du fusible médiateur — supposé négocier avec les enseignants-chercheurs sans changer quoi que ce soit aux projets de loi — que les enseignants-chercheurs sont des planqués, jamais évalués, improductifs, et qui méritent qu’on augment leur nombre d’heures d’enseignement pour les punir d’un manque (imaginaire) de publications.

Vous savez quoi ? Ça marche. À force de l’entendre répété sur TF1 et France 2, de le voir imprimé dans les quotidiens gratuits du métro ou dans le Figaro, les gens y croient. Hors de l’université, on est convaincu que les enseignants-chercheurs ne travaillent pas. Mes voisins sont convaincus que, contrairement à eux, en tant qu’enseignant-chercheur, je peux me libérer à n’importe quelle heure, n’importe quel jour pour faire face à une urgence de plomberie. Ma mère est convaincue que, avec mon travail, j’ai tout le temps du monde à ma disposition. Dans l’université, on commence à se convaincre qu’on est le seul à travailler, ou la seule équipe où l’on travaille sérieusement, ou le seul laboratoire, ou la seule ville et que les autres n’en fichent pas une. Mon épouse, à laquelle il arrive de faire 15 heures de travail en une journée, est convaincue qu’elle ne fait rien et que je travaille plus qu’elle. J’ai fini par me convaincre que je ne travaillais pas assez.

Alors, plutôt que de continuer à broyer du noir, j’ai pris quelques mesures : sur une semaine, j’ai chronométré chacune de mes activités et j’ai tenu un journal, heure par heure. Laissez-moi vous en présenter le bilan.

Temps de travail

Dans cette rubrique, je compte

  • le temps consacré à faire de la Recherche
  • le temps consacré à faire de l’Enseignement
  • le temps consacré à remplir des tâches administratives, c’est-à-dire presque uniquement quémander de l’argent ou des autorisations pour pouvoir faire de la Recherche ou embaucher un doctorant
  • le temps habituellement consacré à une des tâches précédentes mais qui, en cette semaine de protestation, a été consacré à expliquer mon travail, les réformes et à lutter contre ces dernières.

Ne sont pas comptées les pauses déjeuner ou thé ou les discussions avec mes collègues, le temps passé à consulter mon mail personnel ou les transports en commun, sauf si j’ai travaillé durant le trajet.

Voici donc le bilan.

  • Temps consacré à des tâches qui relèvent uniquement du domaine de la Recherche : 24h et des poussières.
  • Temps consacré à des taches qui relèvent uniquement du domaine de l’Enseignement : 10 h et des poussières.
  • Temps consacré à des tâches qui relèvent à la fois de la Recherche et de l’Enseignement : 24h45 et des poussières.
  • Temps consacré à des tâches administratives : 4h30.
  • Temps normalement travaillé mais employé cette semaine à défendre mon travail : 7h20.

Soit63h20 de travail effectif cette semaine ou encore, si l’on suppose qu’une semaine normale se déroule de la même manière mais sans avoir à défendre mon travail, 70h45 de travail durant une semaine normale.

Soit encore un peu plus de 9h de travail par jour, samedi et dimanche compris — ou, toujours sous les mêmes hypothèses, un peu plus de 10h par jour, samedi et dimanche compris, sur une semaine normale.

Temps de pause

Dans cette rubrique, je compte

  • le temps passé dans les transports en commun sans travailler
  • le temps passé à manger, à prendre un thé, etc. sauf lorsqu’il s’agit de travailler avec des collègues autour d’un repas
  • le temps passé à consulter mon mail personnel
  • le temps passé à faire des courses, faire le ménage, me reposer, etc.

Je n’ai pas cherché à faire la différence entre ces catégories. Nous arrivons à un total de 42h de pause et des poussières, soit 6h par jour, samedi et dimanche compris. On est assez loin des 8h par jour plus le dimanche chômé du Front Populaire.

Temps de sommeil

Dans cette rubrique, je compte tout le temps passé au lit, avec ou sans livre à la main, avec ou sans la radio allumée, le soir ou le matin. Je n’ai pas cherché à faire la différence entre ces catégories. Nous arrivons à un total de 54h de sommeil, soit un peu moins de 7h par nuit, samedi et dimanche compris.

Si vous suivez le détail des calculs, vous constaterez que quelques heures manquent à l’appel, perdues lors des divers arrondis. Je ne jurerais pas qu’il s’agit d’heures de repos.

Bilan

Le bilan est simple. Si mes hypothèses sont justes, chaque semaine, je fais un peu plus de deux fois les 35 heures. Et si mes hypothèses sont fausses, je ne travaille “que” 63h et quelques. J’y passe 7 jours par semaine et je manque de sommeil. Par-dessus cela, le gouvernement, par l’intermédiaire des médias, s’acharne à prouver que je suis paresseux et inutile et qu’il faudrait me sanctionner sur des critères arbitraires en ajoutant des heures d’enseignement ou d’administration.

Car oui, à ce prix-là, je suis improductif et punissable. Certes, OCaml Batteries Included est une petite révolution dans le domaine d’enseignement/recherche/applications concerné — citons comme indicateurs que ce projet sera bientôt inclus dans de nombreuses versions de Linux, qu’on en parle sur un certain nombre de blogs et que Google trouve 13.600 résultats, qui restent pertinents au moins jusqu’à la 30ème page. Certes, j’ai écrit trois articles depuis juillet et j’en ai un autre sur le feu. Certes, le système de types sur lequel je travaille est intéressant et inédit. Certes, mes deux projets précédents auraient eu une chance, s’il y avait eu la volonté et les moyens de les mener jusqu’à leur conclusion, d’améliorer légèrement la sécurité de quelques systèmes  d’exploitation. Mais je n’ai aucune publication récente de Catégorie A, notamment car la définition de Catégorie A a été faite selon des critères qui ne correspondent pas à mes sujets de recherche. En même temps, ça ne change pas grand chose : sous peu, mes supérieurs pourront me sanctionner à volonté, sans avoir besoin de justifications.

Alors que nous apprend cet exercice ? Premièrement, que les mesures que le gouvernement prétend appliquer sont inapplicables. Si l’on suppose que mon cas est à peu près représentatif des jeunes enseignants-chercheurs sans enfants, on peut immédiatement constater qu’il n’y a pas de réserves de temps disponibles dans la semaine pour faire plus d’enseignement. C’est d’autant plus vrai qu’avec mes 63h de travail, j’ai trouvé moyen de prendre du retard par rapport à tout ce que j’étais supposé faire : je n’ai pas pu participer à la journée portes ouvertes de mon université, je n’ai pas eu le temps de préparer tous mes cours, je n’ai pas eu le temps de faire les transparents pour un exposé que je devais donner quelques jours plus tard. Ajouter des heures d’enseignement, c’est ni plus ni moins qu’enlever des heures de recherche et pousser un enseignant-chercheur à démissionner.

La deuxième conclusion est indirecte. Le gouvernement prétend porter des jugements sur le corps des enseignants-chercheurs, manifestement sans connaître ce corps. Alors savez-vous ce qui se passe lorsque le Bien-Aimé Président de la République utilise des chiffres mensongers pour attaquer des agents de la fonction publique qui sont prêts à sacrifier leur temps de sommeil, leur temps de loisir, sans compter leurs vacances, juste pour pouvoir mener à bien leurs tâches ? Savez-vous ce qui arrive lorsque madame le Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche  fait preuve d’une grande liberté avec la vérité pour justifier des réformes dont les deux rôles principaux sont de faire des économies sur les susdits agents et de supprimer l’indépendance de la Recherche ? Il se passe exactement la même chose que dans l’enseignement primaire ou secondaire ou que dans l’hôpital : le pacte social est brisé.  Et après une telle trahison, il ne faut pas s’attendre à ce que le génie rentre dans la bouteille. C’est un appel à la grève, au départ à l’étranger et à la démission.

Ah, un dernier point. Je vais essayer de lever un peu le pied. Mais ça ne changera pas une chose : comme tous mes collègues dans l’enseignement ou/et la recherche, je suis en colère.

Journal d’un tire-au-flanc de chercheur (8) : Fainéants de tout le pays, unissez-vous

February 19, 2009 § 5 Comments

Résumé des épisodes précédents

Le gouvernement a amplement raison, les chercheurs sont des glandeurs et ce qui manque pour les rendre plus productifs, c’est de devoir se justifier en permanence pour avoir le droit de faire de la Recherche. Au cours des épisodes précédents, nous avons suivi l’emploi du temps d’un enseignant-chercheur paresseux et, indirectement, de son enseignante-chercheuse fainéante d’épouse.

Nous avons quitté notre anti-héros dans la nuit du mercredi au jeudi, en train de travailler non loin de son épouse. Nous le retrouvons quelques petites heures plus tard, fort épuisé, un jour de grève et de manifestations. Il s’agit de la dernière demi-journée de ce journal. J’arrêterai à 18h10, exactement une semaine après l’avoir commencé.

« Read the rest of this entry »

Journal d’un tire-au-flanc de chercheur (7) : Mercredi, longue journée nonchalante

February 18, 2009 § 1 Comment

Résumé des épisodes précédents

Le gouvernement a amplement raison, les chercheurs sont des glandeurs et ce qui manque pour les rendre plus productifs, c’est de devoir se justifier en permanence pour avoir le droit de faire de la Recherche. Au cours des épisodes précédents, nous avons suivi l’emploi du temps d’un enseignant-chercheur paresseux et, indirectement, de son enseignante-chercheuse fainéante d’épouse.

Nous avons quitté notre anti-héros dans la nuit du mardi au mercredi, loin de son épouse. Nous le retrouvons quelques petites heures plus tard, toujours aussi loin, et prêt à affronter une longue journée de travail glande.

« Read the rest of this entry »

Journal d’un tire-au-flanc de chercheur (6) : Mardi, le train-train du fonctionnaire

February 17, 2009 § 3 Comments

Résumé des épisodes précédents

Le gouvernement a amplement raison, les chercheurs sont des glandeurs et ce qui manque pour les rendre plus productifs, c’est de devoir se justifier en permanence pour avoir le droit de faire de la Recherche. Au cours des épisodes précédents, nous avons suivi l’emploi du temps d’un enseignant-chercheur paresseux et, indirectement, de son enseignante-chercheuse fainéante d’épouse.

Nous retrouvons notre anti-héros le mardi tôt. Si tout se passe comme prévu, il ne va encore rien faire de sa journée, si ce n’est regarder l’heure à laquelle il pourra quitter le boulot. Enfin, boulot, boulot, c’est un fonctionnaire, alors on se comprend.

« Read the rest of this entry »

Journal d’un tire-au-flanc de chercheur (5) : Lundi, c’est ravi au lit.

February 16, 2009 § 1 Comment

Résumé des épisodes précédents

Le gouvernement a amplement raison, les chercheurs sont des glandeurs et ce qui manque pour les rendre plus productifs, c’est de devoir se justifier en permanence pour avoir le droit de faire de la Recherche. Au cours des épisodes précédents, nous avons suivi l’emploi du temps d’un enseignant-chercheur paresseux et, indirectement, de son enseignante-chercheuse fainéante d’épouse. Pas de chance, ils sont tous les deux malades, mais ce n’est pas ça qui va les empêcher de travailler glander : ils ont tous les deux des cours à préparer et des recherches à entreprendre.

Nous retrouvons notre anti-héros le lundi matin. Si tout se passe comme prévu, il ne va encore rien faire de sa journée.

« Read the rest of this entry »

Journal d’un tire-au-flanc de chercheur (4) : Le dimanche, c’est aussi le jour du flemmard

February 15, 2009 § 1 Comment

Résumé des épisodes précédents

Le gouvernement a amplement raison, les chercheurs sont des glandeurs et ce qui manque pour les rendre plus productifs, c’est de devoir se justifier en permanence pour avoir le droit de faire de la Recherche. Au cours des épisodes précédents, nous avons suivi l’emploi du temps d’un enseignant-chercheur paresseux et, indirectement, de son enseignante-chercheuse fainéante d’épouse. Pas de chance, ils sont tous les deux malades, mais ce n’est pas ça qui va les empêcher de travailler glander : ils ont tous les deux des cours à préparer et des recherches à entreprendre.

Nous retrouvons notre anti-héros le dimanche.

« Read the rest of this entry »

Journal d’un tire-au-flanc de chercheur (3) : Le samedi, le flemmard se reposa

February 14, 2009 § 1 Comment

Résumé des épisodes précédents

Le gouvernement a amplement raison, les chercheurs sont des glandeurs et ce qui manque pour les rendre plus productifs, c’est de devoir se justifier en permanence pour avoir le droit de faire de la Recherche. Au cours des épisodes précédents, nous avons suivi l’emploi du temps d’un enseignant-chercheur paresseux et qui, quoique malade, a tout de même passé le plus clair de son temps à travailler. Il faisait certainement semblant, n’en doutons pas.

Nous retrouvons notre anti-héros le samedi matin.

« Read the rest of this entry »

Journal d’un tire-au-flanc de chercheur (2) : Vendredi 13, est-ce que ça porte chance aux paresseux ?

February 13, 2009 § 1 Comment

Résumé des épisodes précédents

Le gouvernement a amplement raison, les chercheurs sont des glandeurs et ce qui manque pour les rendre plus productifs, c’est de devoir se justifier en permanence pour avoir le droit de faire de la Recherche. Au cours des épisodes précédents, nous avons suivi l’emploi du temps d’un enseignant-chercheur paresseux, dont l’activité principale, entre 18h et 1h du matin, a consisté à travailler pendant que sa paresseuse d’épouse enseignante-chercheuse faisait de même dans la pièce à côté.

Nous retrouvons notre anti-héros le vendredi à l’aube.

« Read the rest of this entry »

Where Am I?

You are currently browsing entries tagged with médisance at Il y a du thé renversé au bord de la table.